Mumei se regarde dans une flaque. Il a plu de nouveau au village. Elle s'observe, se juge, se jauge. Elle passe une main sur son masque en céramique. Son faux visage garde encore la trace de l'arabesque tracée par Kazuki lors de sa rencontre avec lui. Son doigt suit la ligne jusqu'au coin de son œil. Mumei se rend compte qu'il a eu la délicatesse de ne pas fendre son masque, dans un total contrôle de sa puissance et de sa force. Elle soupire.
Ce n'est pas aujourd'hui qu'elle trouvera qui est Mumei.

Elle se relève vivement et trouble son reflet en marchant dans la flaque. Elle dévale quelques marches pour rejoindre le village. Ses pieds connaissent par cœur cet escalier, de nombreuses fois emprunté. Un forgeron l'appelle au loin, alors qu'elle chipe un poisson séché qu'elle fourre dans sa bouche. D'un geste de la main qu'il balance de gauche à droite, il lui demande de venir à lui. Son visage détendu ne présage aucune remontrance alors Mumei le rejoint au petit trot, mâchouillant la chair salée. La main qui nourrit caresse ses cheveux et lui dit "Mumei, nous avons un invité de marque. Apporte lui ça." On lui pose un plateau d'onigiri dans les mains. Son poisson a failli tomber et elle le rattrape de justesse dans un claquement de dents.
Apporter le plateau. Facile.

Après lui avoir indiqué où trouver cette personne, le forgeron repart travailler et marteler l'acier. Mumei n'a plus trop d'appréhension à rencontrer des nouvelles personnes. Sa vie commence à peine à changer, mais elle a déjà beaucoup évolué. Elle a vu des démons : Miyuki, Kazuki et bien sûr Kohaku dont elle porte toujours le collier autour du cou, son nom gravé dans la jade lisse et qui attend que Mumei trouve le sien pour l'accompagner. Elle a aussi rencontré quelques personnes plus ou moins bien intentionnées.
Le ninja par exemple avec qui elle a passé une petite semaine... Il lui a appris à devenir aussi silencieuse qu'une ombre. C'est vraiment utile pour chaparder à manger. Mumei se dit que maintenant Miyuki aurait bien du mal à la trouver au cache-cache, et que même Kazuki aurait quelques difficultés.

L'enfant-loup gambade joyeusement avant de se prendre à son nouveau jeu favori. Pattes de velours, elle traverse le village par les toits et se rend aux sources chaudes. Mais là-bas, après avoir fait le tour et même demandé, il n'y a pas la personne qu'elle cherche. Elle regarde le plateau d'onigiris. Elle a failli en perdre un en route et maintenant il fait un peu la tronche. Même cassés, les onigiris c'est toujours très bon. Mumei reprend ses recherches.
Aujourd'hui, c'est elle qui chasse.

La journée est bien entamée lorsque Mumei s'avance dans le petit bois qui borde le terrain d'entrainement des pourfendeurs. C'est là qu'ils essayent leurs lames nouvellement forgées. Ensuite parfois, les forgerons rééquilibrent l'acier et ils reviennent tâter des mannequins. Silencieuse vraiment, à pas de loups, Mumei s'approche son plateau à la main. Sous le couvert des arbres, elle observe un instant la personne qui est là, ici avec elle. Un homme plus grand qu'elle (mais ça c'est facile), sec, à l'air concentré. Il a son arme en main, une belle lame neuve qui luit d'un bleu profond. C'est beau. Mumei se demande si elle peut reproduire ça avec des pigments pour peindre un galet de la même façon.

Il tourne la tête vers elle et leur regard se croise. Ah, il l'a remarquée. La Mumei d'il y a quelques semaines n'aurait pas bougé. Aujourd'hui, elle n'a pas une once d'hésitation et sort du couvert des arbres alors qu'il la salue.
Il a l'air amical.

Mumei s'arrête à quelques mètres et lui tend le plateau pour toute réponse. Quatre onigiris sur cinq sont intacts. Celui qui est cassé laisse découvrir son coeur fourré à la pâte de haricots azukis.
Derrière son masque, Mumei décrit le visage de l'homme devant elle. Hiro Oroshi. C'est un peu long. Pourquoi faut-il avoir des noms et se compliquer la vie ?
Retenir tout ça, c'est du superflu pour elle.

Elle imprime deux syllabes dans sa cervelle et ce sont les bonnes.
Hiro.

Ses yeux bruns dansent des onigiris au pourfendeur. Ah oui... Il faut se présenter aussi.

« Mumei. » dit-elle.

Simple. Facile à retenir. Zéro superflu.
Elle darde ses prunelles sur la lame fine. C'est du beau travail, qu'elle croit reconnaître d'ailleurs. Au village, il n'y en a qu'un seul qui rend les lames bleues. Elle l'aime bien ce forgeron : il est toujours calme et ordonné. Il lui donne de quoi grignoter lorsqu'elle se perd à l'observer dans son travail. Il est gentil. Est-ce que Hiro est aussi gentil que sa lame le promet ?

Mumei pose de nouveau ses yeux sur son visage.
Elle n'a pas peur.

Il la détaille comme elle-même le fait. Hiro a des traits tirés, peut-on dire fatigués. Une barbe de quelques jours poussent timidement sur ses joues et ses favoris. Il a les cheveux très noirs, comme beaucoup de japonais. Mumei les porte plus colorés, comme trempés dans un cacao profond. Il les a apprivoisé dans un chignon qu'elle ne peut pas voir, mais seulement deviner. Mumei les porte courts : c'est plus pratique pour courir. Elle se les coupe elle-même, de façon très disparate. Elle a toujours refusé la vue des ciseaux près de son visage ou de sa tête. La main qui nourrit est gentille et sous une confiance aveugle, peut-être bien qu'elle ouvre un peu les yeux.

Mumei tripote la poignet de son poignard en fer blanc. Il n'a rien à voir avec la lame que porte Hiro. Lui est un véritable pourfendeur, comme elle en voit passer si souvent au village. Mais son katana est plus raffiné que n'importe quel autre. Elle ne se souvient pas en avoir vu un pareil. Elle sait qu'ils sont tous différents, elle n'est pas stupide mais celui-ci inspire une sérénité délicate. Elle revoit la couleur bleue luire sous le soleil, lorsqu'il l'a remise dans son fourreau. Mumei se plait à penser que les lames du soleil sont le prolongement de l'âme de leur propriétaire.
Son épée raconte une histoire que seul l'acier peut comprendre. Mumei pense l'entendre, parfois, et même si elle tend l'oreille, cette langue lui est inconnue.

Emplie d'une certaine curiosité à présent, elle veut savoir qui se cache derrière cette lame.
Hiro lui prend le plateau des mains. Elle était tellement absorbée par ses pensées qu'elle ne l'a pas vu approcher. Elle sursaute un peu, mais la surprise passe vite. Elle le suit, tout naturellement, comme un petit chiot le ferait. Il s'assoit et avant même qu'il ne finisse sa phrase, elle fait de même. Mumei choisit de se mettre tout à côté de lui.
Il est grave et il inspire la confiance. Elle n'a pas peur alors elle se laisse porter par son intuition.

Hiro lui tend des baguettes. L'enfant les prend, puis les pose. Elle ne mange pas souvent avec des baguettes. Elle préfère sentir le riz contre la peau de ses petits doigts. En silence, elle prend un onigiri et le mâchouille, son regard se perdant sur le terrain d'entrainement et dans le calme des environs. Le village est si paisible. Ça fait du bien de revenir de temps en temps, pour s'en imprégner.
Mais là-bas, au delà, la forêt l'appelle.

Mumei tourne la tête vers le pourfendeur. Invité de marque, le forgeron lui a dit. Alors il doit être quelqu'un d'important. Est-ce que Mumei est aussi une personne importante ?
Son esprit divague vers un visage familier et rassurant, elle tripote du bout des doigts la jade portant son nom, accroché à son cou. Elle revient rapidement à elle. Mumei pointe du doigt le katana couleur de l'océan.

« Mumei veut le voir. » demande t-elle, dans un ton approximatif entre la demande et le factuel.

Après sa rencontre avec Kazuki, les informations ont trouvé du sens dans sa tête. Elle a deviné que les pourfendeurs se battent contre les démons, que les forgerons ne leur font pas ces armes pour faire juste du joli sur eux. C'est avec ça qu'ils tuent les démons. L'acier longuement travaillé. Le nichirin. Elle a toujours trouvé ce mot beau. Il sonne bien aux oreilles.
Est-ce que pour devenir plus forte, elle doit aussi le manier ? Est-ce qu'avec ça, elle saurait chasser avec Kohaku ? Mais le nichirin sert à tuer les gens de son espèce. Oserait-elle seulement s'en servir ?

Mumei attend patiemment, la main tendue paume vers le ciel en direction du katana et du pourfendeur.

Au loin un peu, on entend les marteaux qui frappent l'acier. Jour et nuit, les forges ne prennent aucune pause. Mumei sait maintenant pourquoi. Elle a rencontré plusieurs démons. Elle sait que les pourfendeurs les combattent. Elle ne comprend pas vraiment pourquoi : tous les démons qu'elle a rencontré, elle a pu communiquer avec eux et s'en sortir vivante. Pourtant, ils sont les prédateurs des humains. Mais pour Mumei, tout ça est naturel. Le loup prédate le lapin, le daim, le sanglier. L'homme prédate le loup. L'homme prédate tout. Le démon prédate l'homme.
Tout ça, c'est l'ordre des choses pour Mumei.

Ce qu'elle sait en revanche, c'est que Kohaku lui a dit qu'il faut devenir plus forte et que Miyuki lui a dit que pour devenir plus forte (et faire voler les arbres), il faut apprendre le souffle. Apprendre à souffler sur les arbres pour les faire s'envoler. Mumei est toujours perplexe sur cette idée, mais Miyuki lui a dit que seul un pourfendeur peut lui apprendre.
Hiro est un pourfendeur.

Mumei darde ses prunelles brunes sur le visage paisible et marqué par les combats de l'homme. Sa barbe de quelques jours parsème ses joues et tout autour de ses lèvres. Elle détaille les traits caractéristiques de son visage, elle les imprime dans son esprit. Il observe le lointain, un air paisible l'habitant. C'est communicatif : Mumei se sent très calme à ses côtés.
Le calme, ça fait du bien.
Cela fait plusieurs semaines qu'elle court partout, qu'elle fait des rencontres plus stressantes les unes que les autres. Des démons qui risquent de la manger, des hommes qui risquent de la tuer. Hiro a l'air d'être quelqu'un d'extrêmement calme et Mumei se laisse agréablement guider par sa présence. Quelqu'un d'autre lui fait cet effet, et c'est encore mille fois mieux : elle aimerait aussi le revoir. Est-ce qu'il revient dans la maison qu'elle a construite pour eux ?

La paume de sa main cille un peu, à cette pensée. Mais le pourfendeur la rappelle à lui alors que l'acier nichirin frotte contre son fourreau. Il dégaine le bout de son âme et pose délicatement, mais fermement, la poignée dans la main de Mumei. Le sabre est lourd, mais elle s'y attendait. Elle referme ses petits doigts autour du cuir blanc, soutient l'arme aussi horizontale que possible. Le bleu danse sous les lueurs du soleil qui transperce le feuillage de l'arbre sous lequel ils se tiennent. Mumei lève les yeux vers elles, se souvient de cette sensation : komorebi.

Hiro lui pose une simple question, pourtant si difficile à répondre. Mumei repose ses yeux sur la lame bleue qui semble vibrer dans sa main. Son cœur s'est un peu emballé à l'idée de tenir quelque d'aussi beau et qui tue. Une partie du pourfendeur. Elle lève son petit museau vers le visage de l'homme calme. Elle ne sait pas quoi faire avec le katana, elle se sent toute pataude.
C'est avec ça qu'il tue les démons, alors ? Est-ce que c'est avec ça, qu'il fait aussi voler les arbres...?

Mumei fronce les sourcils derrière son masque rouge. Son poignet s'engourdit de tenir une arme aussi lourde, du bout de cette poignée. Sa main est trop petite pour la tenir correctement, il lui faudrait une version plus fine. Son petit poignard lui convient mieux mais lui, il se briserait sur la peau d'un démon. Il se briserait sur la peau de n'importe qui.
Devenir plus forte, alors... avec ça ?
Mumei pose la lame sur ses genoux, elle est assise en tailleur. Elle laisse les doigts de sa main libre parcourir délicatement le fil de la lame et suivre les dessins de vagues sur l'acier trempé. Elle joue avec le feu de se couper un doigt, mais son toucher est trop léger pour qu'elle ne prenne vraiment ce risque. Cette lame est belle, mais intimidante. Est-ce que Mumei va devoir en porter une comme ça, elle aussi ? Kazuki l'a déjà pris pour une pourfendeuse, peut-être la prochaine fois qu'ils se verraient, elle en sera vraiment une.
Est-ce que c'est permis, de devenir prédateur des démons ? Elle ne sait pas trop quoi en penser. Elle a toujours croisé des démons l'ayant laissée en vie, jusque là. Elle en porte même certains dans son petit cœur.

Perdue dans ses pensées, Mumei est restée longuement silencieuse. Qu'est-ce qu'elle en pense alors ?

« Mumei trouve que tu as une très belle âme. » Âme, lame, c'est du pareil au même. Est-ce que Mumei a aussi une belle âme ? Elle grince des dents, discrètement, puis desserre sa mâchoire et rend sa lame à Hiro en la soulevant de ses deux paumes, comme elle tiendrait le plus précieux des trésors. Elle accroche ses yeux à ceux du pourfendeur. « Mumei veut apprendre le souffle qui fait voler les arbres. »

Lui, il doit savoir de quoi elle parle.
Elle pense.
Elle espère.

L'homme lui sourit et la remercie même, tout est respectueux dans sa gestuelle. Mumei se demande comment il la voit. Ce serait pratique de pouvoir se voir à travers les yeux des autres. Comprendre leur point de vue.
Les paroles d'Hiro flottent un instant, avant qu'elle ne percute qu'il vient aussi de lui faire des compliments. Mumei ne sait pas quoi en faire de ses compliments. Elle pose ses mains sur son masque, à son évocation par le samouraï. Ses petits doigts trouvent facilement le chemin de la rayure en arabesque que lui a laissé Kazuki. Est-ce que son masque est plus joli ainsi ?

"Jeune fille" dit-il en parlant d'elle. Mumei est pourtant bien une adulte, à présent, même si son corps accuse le coup d'un retard de croissance conséquent. Elle déteste lorsqu'on la prend pour une idiote, pour une enfant. Souvent, c'est juste que les autres ne prennent pas le temps de la comprendre. De toutes ses rencontres, celles où elle s'est sentie le plus à l'aise sont celles avec des démons. Peut-être que c'est comme ça... Peut-être qu'elle n'est pas assez humaine pour être comprise des humains.
Son regard brun se pose sur le visage d'Hiro lorsqu'il éclate de rire à sa demande. Elle ne sait pas ce qu'il y a de drôle là-dedans ? Elle fronce ses petits sourcils derrière son masque rouge, l'impression de se faire moquer.

Avant qu'elle ne parle ou ne réagisse plus, il prend les devants. Il se lève et, naturellement, elle fait de même. Pourtant, elle ne le suit pas lorsqu'il s'éloigne et revient quelques instants plus tard avec deux Shinaïs. Mumei penche sa tête de côté. Alors, il accepte, c'est ça ?
Les mots prononcés par Hiro ne laissent pas de place au doute. Mumei non plus, n'a pas de doute.

Elle hoche la tête vivement, s'approche de lui et se poste droite devant.

« Mumei est prête. » souffle t-elle d'une voix assurée.

Plus prête que jamais, à devenir plus forte. A ne plus être faible. A pouvoir se défendre devant un démon comme Kazuki, pouvoir leur dire "non" sans craindre pour sa vie. Pouvoir rejoindre Kohaku, dans la forêt, ne plus jamais le quitter. Jamais.

Mumei prend des mains d'Hiro un des Shinaï et elle va se poster plus loin sur le terrain d'entrainement. A l'ombre, les restes de leur repas sont bercés par la brise qui souffle doucement sur le village des forgerons. A son petit nez, elle apporte l'odeur réconfortante de la suie et de la sueur. De l'acier que l'on frappe maintes fois, pour qu'il prenne la forme que l'on désire.
Mumei sait qu'elle devra se laisser frapper plein de fois elle aussi, pour devenir ce qu'elle désire être.

Elle est prête.

Son regard brun, empreint de détermination, fixe avec attention le pilier de l'eau.

Mumei salue, poliment.

Mumei s'applique. Mumei se concentre. Mumei parfois s'énerve, tape du pied sur le sol et a très envie de jeter le shinaï par terre dans un geste de rage. Elle grogne derrière son masque, ravale sa colère et se replace devant le samuraï. Mumei tombe, Mumei se relève. Mumei essaye, Mumei refait les mêmes gestes encore et encore. Mumei est son reflet, Mumei s'essaye à lui ressembler.

Respecte ton adversaire ça c'est facile. Respecte l'art ça aussi c'est facile. Respecte toi-même. Mumei ne sait pas faire ça.
Ferme sans crisper, le toucher délicat mais pas trop. Là, comme ça. Non, plutôt comme ceci. Redresse toi, plie les genoux, baisse toi. Relève toi. Un pas en avant, trois en arrière. C'est ton prolongement pas le contraire. Coordination, pas de brutalité.
Pas de brutalité avec soi-même.

Observe, apprend. Concentre-toi, rassemble-toi.
Mumei essaye de lire les mouvements, d'appréhender les prochaines attaques. Elle commence à avoir mal au crâne, elle ne sait pas si c'est qu'elle se concentre trop ou si c'est parce qu'elle commence à avoir une bosse à force de se prendre des coups de shinaï sur la tête. Lui devant, il danse et elle patauge. Il rend ça si facile que ça en est frustrant.
Mais il a des mots doux et encourageants. Mumei s'accroche, elle ne sait pas si elle fait vraiment bien ou s'il se moque d'elle. Peu importe. Elle doit devenir plus forte.

La fluidité, c'est la clef.
Respire.
Touche sans te crisper.
Attaque sans brutalité.
Tu as fini ?
Recommence.

Mumei est trop concentrée pour percevoir le trouble d'Hiro. Elle-même combat ses démons, rester concentrée lui demande énormément d'effort. Elle a l'impression de piétiner sur place, de ne pas avancer. Ses progrès sont faiblards, à ses yeux, au contraire de ce que semble lui dire le pourfendeur.

Mumei respire profondément, à la recherche de son souffle perdu dans l'effort. Elle fixe Hiro alors qu'il met un terme à la séance alors que le soleil est bien couchant. Mumei sent ses paupières devenir lourdes. Demain, elle recommencera.
Une expression de soi, dit-il. Elle regarde le shinaï en bambou, pensive. Elle n'a pas l'impression que c'est elle. Mumei se sent bien plus elle-même lorsqu'elle court dans la forêt son arc à la main, s'abandonnant au vent qui mord son visage.

L'enfant-loup soupire longuement, sa respiration revenue calme. Elle sent une goutte de sueur couler le long de sa tempe.
Dans son silence, elle accuse les derniers mots d'Hiro. Elle se plie, son shinaï encore dans les mains, le salue comme il le lui a appris.
Lorsqu'elle se redresse, elle lui adresse quelques mots.

« Mumei va devenir plus forte avec ça. »

Elle fait volte-face et disparait sous le couvert des arbres, trottinant gaiement vers le village. Tout ceci lui a donné grand appétit. Il doit bien y avoir quelques poissons grillés, ou un bol de bouillon qui l'attend.
La prochaine fois qu'elle verra Hiro, peut-être qu'elle saura faire voler les arbres ?